Pomme de pinGraines de pin

 

LES POMMES DE PIN OU PIGNES (PINHAS)

Solidement fixées sur les rameaux par un court pédoncule ligneux, les pommes de pin atteignent leur maturité au bout de deux ans,
Elles s'ouvrent alors et laissent échapper les graines dotées d'une longue aile qui facilite leur dispersion en ralentissant leur chute.

 

 

 

 

La récolte, la préparation et la vente des pommes de pins (pignes) étaient des activités si spécifiques à la commune d'ONDRES, en ce début du vingtième siècle, que toute la population du village s'est vue appliquer l'appellation de "Pigners" et "Pignères" (pinhèrs, pinhèras) .
Plus de trente familles les pratiquaient régulièrement, mais elles sont complètement abandonnées aujourd'hui. Le dernier pigner a renoncé en 1960, faute de débouché.

Ces activités étaient liées à la proximité des villes de BAYONNE et BIARRITZ, qui constituaient un marché de citadins utilisateurs de pignes comme allume-feu, mais aussi à une réserve abondante de matière première.
Des occupations identiques ont été signalées aux environs de DAX et d'ARCACHON qui présentaient une situation comparable.

LES OUTILSEstoma : outil pour détacher les pommes de pin

Une échelle spéciale : très légère et étroite, faite du tronc d'un vergne refendu à la scie sur toute sa longueur. Les montants, longs de 4 à 5 mètres, n'étaient pas équarris, mais étaient assemblés, les faces brutes de sciage à l'intérieur. Les barreaux, très courts, ne permettaient de placer qu'un pied. Pour améliorer la stabilité, les extrémités inférieures, les plus grosses, étaient appointées pour être plus facilement plantées en terre avant l'escalade.

L'estoma : une barre de bois léger, en noisetier par exemple, longue de 2,50 m environ, terminée par un crochet en fer forgé.

Il était destiné, par poussée ou si besoin par torsion, à rompre le pédoncule des pignes et donc à entraîner leur chute sur le sol.


L'arretàu : sorte de râteau sans dents constitué d'une planche fixée à un manche.

 

LA RECOLTE

La commercialisation demandait des produits d'aspect brillant, suintant la résine, donnant une qualité d'allume-feu incomparable.
Pour les obtenir il fallait donc prendre les fruits sur les pins, après leur complet développement, mais avant leur maturité, et les faire ouvrir dans des fours.

La collecte se faisait dans les bois privés ou communaux, sur le territoire d'Ondres mais parfois aussi assez loin, pour assurer une récolte importante (exceptionnellement jusqu'à VIEUX BOUCAU, MESSANGES, ou même MOLIETS).
Ce trajet avait lieu en convois de deux ou trois attelages du même quartier. Les véhicules étaient de petites charrettes légères en forme de tombereaux, tirées par un mulet ou une mule, parfois par un âne de forte taille.

Ainsi, au terme d'un long voyage , commencé parfois à deux heures du matin, les pigners parvenaient dans une parcelle de pins de trente ans, hauts de plus de 15 mètres.
Ils devaient les escalader à l'aide de l'échelle qui permettait de dépasser la partie basse du tronc, celle qui présente les "carres", ces blessures régulièrement avivées par le gemmeur pour faire écouler la résine.
Puis il fallait, encombré de l'estoma, atteindre les premières branches à 10 ou 12 mètres du sol.
Des hommes, des enfants, mais aussi des femmes se sont livrés pendant des années à cette tâche. Ces dernières enfilaient pour cela des pantalons d'hommes, et montaient ainsi sur 15 ou 20 pins pour recueillir un chargement.
La deuxième phase du travail consistait à ramasser les pignes au sol, parfois dans les ajoncs ou les ronces et à remplir les charrettes. Les enfants exécutaient souvent cette tâche.
Puis le retour se déroulait dans la soirée, tout le monde juché sur le produit de la collecte, assis sur des sacs vides, journée bien remplie, qui ajoutait son apport à la réserve ainsi reconstituée régulièrement.

LE TRAITEMENT

Les jours suivant la récolte, on procédait à l'ouverture des pignes en les enfermant durant plusieurs heures dans un four préalablement chauffé.
Ce dernier, construit sous un abri protégeant aussi charrettes et réserves de pignes, avait la forme d'une coupole.
Son soubassement, constituant la sole, se situait à presque un mètre de hauteur, était fait de pierres plates. La partie supérieure était bâtie en briques barrot, jointoyées à l'argile.
Sur l'avant, une porte verticale, constituée des mêmes matériaux servait au remplissage et au nettoyage. Par cette ouverture s'échappait librement la fumée.
Pour son usage, le four était bourré une ou deux fois de feuilles de pins, de broussailles, ou de branches, le tout prélevé aussi, bien entendu, dans la forêt, comme une contribution à son nettoyage.
Le four était ensuite vidé des débris incandescents. La température devait être juste suffisante pour provoquer l'ouverture des pignes.
On procédait aussitôt à son remplissage , répartissant uniformément les pignes avec un arretàu, en laissant cependant la place nécessaire à leur ouverture (elles peuvent, dans ces circonstances, doubler leur volume initial). Puis la porte devait être fermée, aussi hermétiquement que possible, pour conserver longtemps la chaleur.

LA VENTE

Enfin se faisait la mise en sacs de jute, typiquement très étroits. Le remplissage suivait une technique très spéciale : remplis à ras bord, ils étaient maintenus pleins et fermés par une ficelle croisillonnée au dessus de pignes très apparentes. Ces dernières étaient choisies avec soin, bien brillantes, bien développées.
Un complément, transporté en vrac, garnirait, avant le départ, le fond du véhicule.

Le voyage à BAYONNE et BIARRITZ se faisait dans des véhicules différents, mieux équipés, comportant une suspension par ressorts et un dispositif de freinage : une autre journée passée au rythme de l'allure des bêtes, souvent le mercredi ou le samedi. On put ainsi compter, un jour, 17 attelages de pigners échelonnés dans la côte de La Yayie à TARNOS.
C'était toutefois des temps fastes, car on ramenait de la ville denrées rares et pain blanc.

La clientèle était constituée principalement par la population aisée, mais aussi par les habitants des quartiers populaires, preneurs du deuxième choix.
Les registres de comptabilité de la ville de BAYONNE portent, jusqu'à 1958, la mention de règlements faits à des Ondrais pour la fourniture de pommes de pins. Elles étaient destinées à l'allumage des calorifères dans les classes des écoles municipales primaires, collèges moderne et classique, école des beaux-arts, centre médico-social scolaire.

Pignes sur pin

Tas de pignes

Pigne et graines au sol