En 1794, Ondres reçut un contingent de Basques déportés de leur village.
Après la chute des Girondins et leur exécution le 31 octobre 1793, la france se trouve aux prises avec des désordres intérieurs auxquels s'ajoutent les périls extérieurs sur les frontières. Au Pays Basque, l'Armée des Pyrénées occidentales est opposée aux troupes espagnoles, sur un terrain qui parait peu sûr en raison de l'hostilité de la population.
Des traditions en partie préservées sous l'Ancien Régime...
Le Labourd, devenu français en 1451, a conservé sous l'Ancien Régime la plupart de ses traditions ancestrales, linguistiques et juridiques, comme par exemple le règlement des successions en tenant compte du droit d'aînesse, dont bénéficie la fille aînée aussi bien que le fils aîné, moyennant d'assurer une contrepartie aux autres frères et soeurs célibataires. Les Basques ne connaissent pas la féodalité, et jouissent d'une véritable constitution, sous la direction de leurs assemblées élues. De plus la foi dans la religion catholique était importante au Pays Basque.
... et supprimées par la Révolution
De 1789 à 1794, tout cela a changé: les constitutions particulières à certains pays sont abolies, la dévolution des héritages se fait de façon égalitaire, la conscription est instaurée et la constitution civile du clergé a tenté de contraindre les prêtres à renoncer à l'ancienne structure de l'Eglise.
Les Basques opposent une résistance passive à la législation révolutionnaire qui abolit leurs libertés séculaires, leurs coutumes privées et publiques. Beaucoup de prêtres ont refusé de prêter serment, et la proximité de la frontière leur permet d'échapper aux poursuites et de continuer secrétement leur ministère.
Autant de choses qui, ajoutées à la pratique d'une langue réputée incompréhensible, rendent les Basques suspects. Pourtant, beaucoup de jeunes hommes ont répondu à l'appel aux armes et combattent dans les armées de la République et sa marine (dont 250 jeunes gens de Sare).
Dans la nuit du 1er au 2 ventose de l'an II (19-20 février 1794), 47 conscrits d'Itxassou abandonnent leur unité et franchissent la frontière.
Cette désertion entraîne une répression démesurée.
L'arrêté du 4 ventose de l'an II (22 février 1794) des deux Conventionnels PINET et CAVAIGNAC, d'une rigueur déjà excessive, ordonne la poursuite des parents des 47 soldats, et la mise sous séquestre de leurs biens. Puis l'arrêté du 13 ventose de l'an II organise un climat de terreur sur le Pays Basque, sous la direction des mêmes PINET et CAVAIGNAC, les habitants d'Ainhoa, Ascain, Biriatou, Cambo, Espelette, Itxassou, Larressore, Macaye, Mendionde, Sare et Souraide (3000 à 4000 suivant les sources) sont internés dans l'église de leur village. La répression dépasse donc largement les limites de la désertion.
Après une nuit d'internat, les déportés sont chargés sur plus de 150 charrettes attelées de boeufs et conduits à Bayonne. Pour ajouter à la cruauté, on les fait passer par Saint-Jean-de-Luz, Ciboure, Saint-Jean-De-Luz à nouveau. Ils parviennent à Bayonne exténués, affamés, ayant subi parfois injures et moqueries.
La municipalité et la Société Révolutionnaire de Chauvin-Dragon (Saint-Jean-de-Luz) avaient demandé la déportation de la population de Sare dès le 5 frimaire de l'an II (25 novembre 1793). Il s'agissait de régler un différend de voisinage avec ce village.
Conduits à Jean-Jacques Rousseau (Saint-Esprit), ils sont répartis dans 12 communes des Landes, principalement à Saint-Vincent-de-Tyrosse, Capbrutus (Capbreton) et Ondres qui reçoit un contingent de 101 ou 106 personnes selon les sources, et après être allé les chercher avec une douzaine de charrettes, les interne dans son église.
Nous savons peu de choses sur les conditions de détention, mais on peut imaginer l'inconfort d'un si petit édifice ne disposantd'aucun équipement nécessaire à un tel rassemblement. Les familles avaient été dispersées, ajoutant encore à la misère morale des déportés. Les documents d'état civil d'Ondres mentionnent le décès de six captifs, une femme et cinq enfants (4 originaires de Sare, 1 d'Ascain). Sur l'ensemble des basques déportés, 1600 décèderont pendant leur captivité.
L'alimentation et les soins à donner à tous ces nouveaux venus devaient embarrasser les autorités ondraises autant que celles de Capbreton et Saint-Vincent-de Tyrosse, comme en témoignent des documents relatifs à ces communes. Deux notes de 396 et 700 livres ont été payées par le Directoire du district d'Ustaritz à la commune d'Ondres pour la dépense des basques détenus.
L'église dans laquelle les Basques ont été internés à Ondres, est probablement celle qui figure sur le plan cadastral de 1826, située à côté du vieux cimetière, à l'ouest de la route nationale. Elle a été démolie après la construction de l'église actuelle en 1882.
Le 12 floréal de l'an II (1er mai 1794), des décisions d'humanisation sont appliquées aux conditions de détention. Elles sont prises aussi parce que les reclus encombrent et coûtent tant soit peu aux collectivités, et qu'il convenait de libérer les églises de leurs occupants pour permettre l'usage de ces bâtiments pour le culte de l'Etre Suprême. On les répartit donc dans un plus grand nombre de villages, où ils furent soumis à un contrôle de présence.
La fin de la Terreur permit le retour des déportés dans leurs villages, à l'exception des nobles et des prêtres, par l'arrêté du 9 vendémiaire de l'an III (30 septembre 1794). Puis celui du 10 vendémiaire restitua "leurs biens, meubles et immeubles et effets existants". Des recours étaient possibles en faveur de ceux dont les biens avaient été vendus, mais beaucoup avaient été pillés ou saccagés pendant l'absence de leurs habitants. Plus tard, de nouveaux représentants du peuple établissent la responsabilité des autorités révolutionnaires de Chauvin-Dragon, dont certains sont mis en état d'arrestation, suite à l'arrêté du 16 prairial an III (4 juin 1795).
Pendant cette année 1794, le pays landais où les Basques étaient déportés fut lui aussi soumis à la Terreur. Les Landais durent supporter le manque de ravitaillement, la misère, la frayeur des arrestations et des exécutions. Certains connurent aussi l'exil: tous les prisonniers détenus à Dax pour incivisme furent conduits et enfermés à Pau pendant plusieurs mois.